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Proposition de conférence au Touquet pour L’AVEF (2003) :
 

Notion de globalité envisagée en ostéopathie et médecine traditionnelle chinoise au travers d’un exemple concret *

Créé le : dimanche 26 mars 2006 par Patrick Chêne

Dernière modificaton le : mercredi 23 janvier 2019

Résumé : A partir d’une série de cas où le cheval présente à la fois une boiterie persistante localisée au boulet d’un antérieur ainsi que quelques désordres digestifs et des raideurs de l’arrière main, on se sert du diagnostic ostéopathique et des concepts de médecine traditionnelle chinoise pour montrer que ces deux problèmes apparemment sans lien sont en fait indissolublement liés.

A) DEUX CAS ISSUS D’UNE SERIE

Durant une période assez courte en septembre, ont été présentés en consultation plusieurs chevaux présentant à la fois :

 Une pathologie persistante sur le boulet de l’antérieur droit (tendinite, péri tendinite, entorse) guérissant très mal avec les moyens employés en médecine classique.

 Une raideur de l’arrière main avec défaut d’engagement du postérieur droit et quelques désordres digestifs (gaz, crottin sec ou au contraire un peu mou)

De ces deux problèmes, le premier motive la consultation, le deuxième semble anodin et pourrait être occulté par rapport à la gravité du premier. En fait à partir de deux cas représentatifs de cette observation fréquente dans un exercice ostéopathique nous allons voir que non seulement le lien peut-être fait, mais qu’il est souhaitable de le faire.

AZAD : jeune étalon pur-sang arabe de cinq ans utilisé comme cheval d’endurance est présenté pour péri tendinite du tendon perforant (fléchisseur profond des phalanges) de l’antérieur droit soigné depuis trois mois par du repos et des anti-inflammatoires non stéroïdiens, ainsi que par divers soins locaux. Le problème vient de s’aggraver à nouveau compromettant sa saison sportive ce qui motive la consultation.

 L’examen classique :

Visuellement le tendon concerné est légèrement plus gros que l’autre et à la palpation présente effectivement une inflammation de la gaine du tendon se traduisant par un œdème. Au pas une légère dissymétrie des appuis est constatée, flagrante au trot.

 L’examen ostéopathique :

Il fait apparaître des dysfonctions (perturbation de la mobilité articulaire) au niveau du sacrum, de la cinquième vertèbre lombaire (L5), du caecum, de D18 de D4, de C7, et C0, de l’épaule droite et du boulet antérieur droit. Ces dysfonctions sont mises en évidence par des tests ostéopathiques de mobilisation passive plus ou moins fine de chaque articulation

NEPTUNE : Hongre selle Français de dix ans utilisé comme cheval de promenade est présenté pour une suite d’entorse grave du boulet de l’antérieur droit soignée par la pose d’une résine pendant deux mois avec repos et anti-inflammatoires non stéroïdiens. Malheureusement trois semaines après le retrait de la résine, il n’a toujours pas d’appui sur le membre ce qui motive la consultation, et, petit détail, l’odeur dans le boxe est très forte, le crottin de couleur sombre est très malodorant.

 L’examen classique :

Le boulet de l’antérieur droit est douloureux à la palpation, son volume est doublé, la radio passée par un confrère ne laisse pas voir d’anomalie osseuse significative.

 L’examen ostéopathique :

On trouve des dysfonctions : sacro-caudale, L6 et L5, caecum, L1, D10, C7, C2, frontal droit, épaule droite, coude droit, et boulet droit bien sûr.

Dans ces deux cas, l’abord symptomatique a échoué à résoudre entièrement le problème. La prise en compte des dysfonctions ostéopathiques, in extenso une perte de mobilité d’un tissu par rapport à un autre, nous permet de constater ce qu’un examen classique ne prend pas en compte, l’ensemble des tensions musculaires et l’existence dans ces deux cas d’un problème digestif mineur.

Mais quel est l’intérêt diagnostic et thérapeutique d’un examen global dans la compréhension et la gestion de tels cas ? Un exercice intellectuel ou un réel intérêt ?

Nous allons par la suite en expliquant les principes de base d’ostéopathie et de médecine chinoise aller à la conclusion que l’intérêt est bien réel.(1)

B) LES CONCEPTS OSTEOPATHIQUES MIS EN CAUSE.

L’examen ostéopathique permet, par des tests, de trouver des dysfonctions et non des altérations tissulaires qui sortent du cadre de ce soin. Ce sont des pertes de mobilité d’un tissu (le plus souvent osseux) par rapport à un autre.

La notion de dysfonction ostéopathique.

Classiquement c’est la vertèbre "déplacée" qui ne l’est évidemment pas, mais qui ne peut s’adapter à tous les mouvements qui lui sont demandés.

*Macro et micro mouvement adaptatif

Ainsi une vertèbre devra pouvoir se fléchir vers le bas ou au contraire aller vers le haut, devra pouvoir s’incliner latéralement à droite ou à gauche, et faire une rotation du corps vertébral à droite ou à gauche.

Une articulation comme le boulet fait une flexion / extension, mais aussi une abduction et adduction adaptative et le métacarpe doit aussi pouvoir faire une rotation interne ou externe sur la phalange ainsi qu’une compression / décompression.

Ces petits mouvements adaptatifs sont considérés comme primordiaux à rétablir pour que l’articulation puisse fonctionner correctement.

La perception manuelle d’une dysfonction de cet ordre est signe d’une perturbation du fonctionnement des récepteurs proprioceptifs et nociceptifs articulaires, tendineux et musculaires.

C’est aussi une perturbation du sympathique responsable du tonus musculaire et par là même de la qualité du mouvement et de la vascularisation donc de l’aptitude in fine des tissus à cicatriser.

Une manipulation ostéopathique va restaurer ces mouvements adaptatifs et de fait régulariser le fonctionnement des récepteurs articulaires et consécutivement des neurones responsables.

*Dysfonction primaire et dysfonction secondaire.

L’examen ostéopathique va permettre de hiérarchiser les dysfonctions trouvées et définir des dysfonctions primaires (plus importantes et/ou plus antérieures) et des dysfonctions secondaires dépendantes des premières et qu’il ne sera peut-être pas utile de travailler. En tous les cas pour comprendre le schéma lésionnel il conviendra de les chercher toutes, des sabots des postérieurs à la tête.

Continuité corporelle : les chaînes musculaires, les fascias.

En effet, cette dernière notion oblige à la globalité : ce n’est pas un boulet qui est amené en consultation mais un cheval. Et le tissu fascial, cet emballage dont on sait qu’il assure forme et parfois nutrition, est en fait continu par relais successif d’un bout à l’autre du corps. Et par continuité une dysfonction en bas peut induire une dysfonction plus haut, l’exemple classique est celui de la rotule qui est un hauban rattaché entre autres au tibia et à la palette iliaque et dont le comportement dépend largement du comportement de ces deux os.

On en arrive ainsi à la notion de chaîne musculaire et de chaîne lésionnelle adaptative. Celle-ci laissant penser que le symptôme observé n’est que la fin d’une longue suite de dysfonctions, et qui ne peut être corrigé efficacement et durablement que si l’on résout les dysfonctions de début de chaîne.

Le système sympathique : tonus, fonction viscérale et vasculaire.

Le système le plus apte à expliquer les résultats ostéopathiques est le système nerveux orthosympathique, globalement métamérisé sous la colonne vertébrale.

Son étude par Irvin Korr [2] montre bien que la dysfonction ostéopathique se traduit par une diminution du seuil de sensibilité des neurones incriminés et ce système, qu’il appelle lentille neuronale, devient hypersensible à tout stimulus venant de ses récepteurs propres ou d’une autre région du corps. Un neurone touché abaisse son seuil pour toutes ses fonctions, ce qui explique qu’une dysfonction vertébrale soit accompagnée d’un dysfonctionnement organique, vasculaire et cutané (cf. schéma). Et en corollaire une action sur l’une ou l’autre de ces fonctions va permettre d’agir en retour sur toutes ses fonctions. Et dans le cas qui nous préoccupe une action sur L5 dont le ganglion sous jacent émet un rameau vers celui sous jacent à L3 qui gère le gros intestin permet d’aider à la régulation d’une dysfonction caecale.

L’ostéopathie nous permet d’avoir une vision de toutes les dysfonctions du corps, donne un outil pour rééquilibrer par manipulation l’ensemble de l’animal d’où un meilleur effet sur le symptôme observé. Ici elle nous permet de comprendre la relation pathologie caecale et raideur du dos. Elle permet de comprendre que l’on ne peut rien négliger tout étant lié. Mais elle ne permet pas ici d’affirmer une relation BOULET/CAECUM, la notion de chaîne fasciale regroupant L5 et antérieur droit n’ayant pas à ma connaissance été trouvée ; Aussi la conceptualisation de l’interrelation revient ici à la médecine chinoise, plus riche en concepts donnant des relations de cause à effet.

C) LES CONCEPTS DE MEDECINE CHINOISE MIS EN CAUSE.


Le méridien Gros intestin :

La médecine chinoise définit des méridiens sur lesquels circulerait de façon privilégiée l’énergie corporelle. Ici c’est le méridien gérant la fonction gros intestin qui nous intéresse, (cf. schéma). Avec plusieurs points particuliers :

*Point YU : Situé Entre L5 et L6 selon Shoen [3], est un point de commande important du méridien GI placé sur le méridien vessie.

Mais qui recoupe l’observation ostéopathique de dysfonction vertébrale de L5 et de perturbation de la zone réflexe du caecum.

*Point SHU antiques :
point d’entrée du méridien couplé aux éléments chinois (eau, bois, feu, métal, terre). Autour du boulet présentant à la fois une dysfonction ostéopathique et une lésion tissulaire vraie, on retrouve les points GI 2 (point eau) et GI 3 (point bois) en face médiale respectivement en bas et en haut du boulet. Un autre point important va être le point GI 11, point de tonification situé en face latérale du coude entre radius et cubitus juste sous l’articulation, point que l’ostéopathie révèle fréquemment en dysfonction dans ces cas là.

On constate alors qu’une dysfonction ostéopathique peut se trouver à l’endroit où se trouve un point d’acupuncture perturbé, ce qui malgré une approche conceptuelle différente en fait deux raisonnements qui travaillent sur les mêmes dysfonctions.

Et l’on voit ici pourquoi on peut rapprocher L5 du boulet, selon le concept acupunctural, on se trouve sur le même méridien au fonctionnement perturbé.

Notion d’éléments, loi d’attaque et d’engendrement., Aspect saisonnier

On peut pousser le raisonnement (4) en comprenant pourquoi le boulet est fragilisé et pas un autre point du méridien Gros intestin :

Le méridien Gros intestin est sous l’influence de l’élément métal ; Les éléments subissent entre eux des interactions selon les lois d’engendrement et de domination dans un fonctionnement normal. Le métal est en interaction avec l’élément eau par la loi d’engendrement, et l’élément bois par la loi de domination. Or, on se souvient que le boulet est encadré par les points eau et bois du méridien gros intestin, d’où sa fragilité en cas de non respect de ses lois.

Resterait à expliquer pourquoi l’on observe des pathologies de boulet droit en septembre et de boulet gauche au printemps avec une tension plus marquée sur le coude à cette occasion.

Ici on peut raisonner sur la circulation du "Qi"

L’énergie annuellement parcourt tous les méridiens et l’on a ainsi une activité annuelle cyclique maximale en septembre pour le méridien gros intestin et minimale six mois plus tard. Avec une pathologie YIN au moment du yang maximal, donc côté droit (plutôt YIN) et une pathologie yang au moment de la décrue maximale (moment YIN), donc côté gauche (plutôt YANG) et la nécessité de traiter le point G.I.11, point de tonification.

En raisonnant à l’extrême on explique facilement certains aspects troublants au premier abord, même si cela nécessite de rentrer dans des raisonnements très peu habituels.


D) LE TRAITEMENT MIS EN OEUVRE.

 Traitement ostéopathique. (5)

Par diverses manipulations, il faudra restaurer les mobilités appropriées afin de réguler les fonctions sympathiques concernées en tenant compte du schéma lésionnel. Ce seront des manipulations structurelles, musculaires, réflexes ou fonctionnelles.

En particulier sur ces cas, il conviendra d’insister sur le traitement :

 De la vertèbre L5,

 Le traitement à long terme de la zone réflexe du caecum par le propriétaire (massage lent et profond de la zone, avec un cheval qui se "couche " sur la main).

 Du boulet en mobilisant toutes les structures dans tous les plans de l’espace, pour restaurer fluidité et souplesse tissulaire. Et aussi par la technique particulière du V. spread, technique liquidienne qui aide à dissiper les inflammations locales.

 Toutes les autres dysfonctions importantes.

 Traitement de la dysfonction digestive.

Et l’on n’oubliera pas de modifier la ration pour une meilleure digestion, souvent en baissant l’apport de glucides ou de protéines, en augmentant l’apport de fibres. Et surtout en réensemençant la flore intestinale avec des produits maintenant courants dans le commerce. Ceci dans le but d’amener une meilleure fermentation caecale, cet organe prend alors moins de volume dans le bassin, les signaux renvoyés par les récepteurs sont moindres et en retour donne une moindre tension musculaire du bassin et des dernières lombaires. Le cheval engage mieux à droite rechigne moins au départ au galop et ne demande pas à déféquer après quelques minutes de travail, ses crottins ont meilleur aspect.

CONCLUSION :

La question demeure est-il intéressant de s’occuper de l’arrière pour soigner l’avant ?

Nous avons intellectuellement compris pourquoi on peut avoir concomitance de symptômes au boulet et sur la L5, mais qu’en faire ?

La réponse pour moi est donnée par le résultat dans ces deux cas : Neptune repose le pied au bout d’une semaine, son boulet dégonfle, quelques visites supplémentaires permettront d’avoir un résultat honnête : pas de boiterie au pas.

Quant à AZAD, il a repris l’entraïnement une semaine après, sans que le travail fasse réapparaître engorgement et boiterie.

Et s’il fallait encore s’en convaincre un coup de fil du propriétaire d’AZAD six mois plus tard (au printemps... yang....) disant : "La semaine dernière, le boulet d’AZAD a regonflé, j’ai redonné le probiotique et c’est passé aussitôt...."

Il est dommage que notre médecine académique ait du mal à adopter ces outils conceptuels que sont l’ostéopathie et la médecine traditionnelle chinoise car ils sont selon nous d’une grande aide dans la compréhension et le traitement de nombreuses pathologies.


BIBLIOGRAPHIE :

1-les chevaux m’ont dit. Dr Dominique Giniaux Ed ; cheval magazine.

2-bases physiologique de l’ostéopathie. Irvin Korr ED. frison roche

3-veterinary acupuncture schoen Ed.mosby

4-traité d’acupuncture vÈtÈrinaire Dr Frédéric Molinier

5-"une consultation d’ostéopathie.." K7 vidéo. Dr P. Chêne Ed vetosteo.com



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