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Journée Animalité-Humanité

Créé le : mercredi 12 février 2014 par Rachel Senault

Dernière modificaton le : mercredi 12 février 2014

WWF est partenaire de cet événement animalier avec la projection des films :

NAC Nos Attirances Complexes de Célia Döring - France -2011- 28’

Jamais sans mon cheval de Eric Bitoun - France -2009- 52’

Le mur invisible de Roman Pölsler - Allemagne/Autriche -2012- 108’

En la présence des réalisateurs (CD et EB) et conférenciers vétérinaires (Cyril Cholet et Frédéric Vlaemynck) spécialistes des NACs de la clinique où était tourné le premier doc (vétos) et animé par Rachel Senault (RS) conférencière et praticienne en Ostéopathie Animale.

Une table ronde et débat ont entrecoupé les projections des docs et du long métrage avec comme fil conducteur une réflexion menée par les conférenciers sur la place de l’animal domestique dans nos sociétés modernes.

Voici quelques extraits sélectionnés qui nous aideront peut-être à définir l’Ostéopathie Animale aujourd’hui :

RS : Le festival s’ouvre aujourd’hui sur le monde animal ou plutôt « homnimal »…
Célia Döring, pourquoi avoir choisi les NACs comme sujet de documentaire ?

CD : Les NACS sont des animaux domestiques extrêmement médicalisés de par la multitude de pathologies qu’ils rencontrent dans des conditions de vie assez éloignées de leur biotope et/ou de leur éthologie. J’ai voulu témoigner avec mes moyens cinématographiques du travail formidable de chirurgie, de prise en charge de l’urgence, de gestion de la fin de vie par ces docteurs spécialistes des NACS qui proposent des solutions médicales extrêmement spécialisées. […]

RS : Je m’adresse aux vétérinaires de la clinique du tournage, comment en êtes-vous venus à vous spécialiser dans les NACs ? Quelle place les NACs ont-ils dans nos sociétés occidentales ?

Vétos : Pour respecter le plus possible leurs besoins physiologiques, une bonne partie des NACs doivent vivre dans des vivariums, dans des conditions hygrométriques et thermiques individualisées, sous des lampes à infrarouge, dans des volières. […] La proximité de la Belgique avec une législation plus permissive sur le marché des NACs favorise la possession des NACs dans le nord de la France, le propriétaire de NACs étant plutôt citadin.
Les NACs ne sont pas tous des animaux exotiques. C’est une catégorie qui regroupe aussi les lapins domestiques, les rats et les souris (souvent sortis des laboratoires pharmaceutiques) qui vivent sous nos latitudes mais dans des conditions de vie et de comportement bien différentes de leur besoins physiologiques et sociaux. Imaginez que plus d’un furet cohabitent avec des chats ou des rats… dans des appartements.

RS : Célia pouvez-vous nous expliquer le sous titre de NAC « Nos Attirances Complexes » ?

CD : J’ai réalisé ce doc il y a presque 3 ans au moment où je finissais mon école de cinéma animalier et où j’étais en recherche de ce que j’allais entreprendre plus tard. Encore un peu étudiante, j’avais un rapport fusionnel avec mes animaux. Ils me suivaient partout dans tous les sens du terme et répondaient aux incertitudes de cette période… J’aime à dire que certains étaient comme mon ombre. D’ailleurs mes camarades de cinéma animalier, la plupart naturalistes, étaient très critiques sur l’idée de filmer dans une clinique vétérinaire des animaux en cage, intubés, sous anesthésie, en captivité médicalisée. […]

RS : Eric Bitoun, pourquoi avoir choisi le monde du cheval et le lycée agricole du Robillard comme lieu de tournage ?

EB : […] J’ai eu beaucoup de plaisir à suivre ces trois jeunes lycéennes dans leur cursus scolaire et équestre. J’ai voulu rendre compte de la réalité familiale, sportive, affective et scolaire de ces adolescentes. Lors de débats après projections, j’ai été quelques fois repris par le public sur l’aspect intime de mes questions quand je les interroge sur leur lien aux garçons, leur vision de l’amour à l’animal et aux petits copains. Il y avait aussi l’interview avec Bartabas où il insiste bien sur les notions de contraintes anthropiques au moment du débourrage et du dressage de ces chevaux-artistes qui sont avant tout sélectionnés pour leur robe et leur phénotype... et non pour leur capacité à répondre aux exigences de performances du spectacle.

RS : En effet Eric Bitoun, nous voyons bien dans votre documentaire comment le cheval et même une vache font l’objet de démonstrations affectives, de relation rassurante et valorisante pour ces adolescentes habitées par le doute et le besoin de reconnaissance. L’exemple de la vache Paille est bien loin des vaches numérotées et étiquetées qui produisent 40 litres de lait par jour, lait dont on nous vante les mérites dans le reportage au salon de l’agriculture… […]
L’animal domestique serait donc un substitut affectif, un outil thérapeutique, un outil créateur de sens artistique, existentiel ?

Public : témoignage sur le lien d’incarnation intime d’une spectatrice thérapeute holistique avec son chat et qui a perduré après la mort de son animal domestique.[…] Références au passage et à la mort illustrés par la dernière séquence sur la gestion vétérinaire de l’euthanasie d’un perroquet dans NAC. Son chat est devenu « une entité » qui l’accompagne dans sa vie.

RS : Nous entretenons avec nos animaux domestiques une relation de proximité dans nos joies et nos peines et jusque dans notre rapport à la mort. Le décès du chien, du chat, du cochon d’Inde ou du lapin d’appartement représente souvent un premier deuil pour les enfants d’une famille. L’animal joue alors un rôle initiatique, un rôle didactique sur le plan émotionnel et cognitif (chronobiologie des personnes âgées, chiens « guérisseurs » dans les hôpitaux d’enfant et même chats-passeurs dans la civilisation égyptienne.) […]
Lors de mes consultations d’Ostéopathie Animale je prends en compte le rôle d’émetteur-récepteur de l’animal domestique. Il éponge nos états psycho-émotionnels et nous renvoie d’autres états (émotifs, comportementaux, pathologiques) propres à son espèce. Notre rôle de thérapeute est de responsabiliser sans culpabiliser certains propriétaires anthropocentrés (notions de commensalisme en éthologie).

Public : Un spectateur gérant de centre équestre évoque l’équi-thérapie comme moyen de rééduquer, de sociabiliser, de remotiver les jeunes.

RS : […] Nos amis les bêtes nous domestiqueraient-il ?
Au sujet de l’équithérapie, je tiens à rapporter les propos de Martine Hausberger de l’Université de Rennes, département d’éthologie que j’ai interviewée pour préparer cette conférence. Elle souligne en effet les bienfaits du cheval ou plutôt du monde du cheval sur les personnes présentant des troubles psychologiques et cognitifs (autisme, dépression…) tout comme l’opportunité de réinsertion sociale dans la microsociété d’un centre équestre pour des personnes désociabilisées. Mais elle reste réservée sur l’efficacité de la rééducation motrice par le cheval. Ces programmes demandent un personnel encadrant qualifié, une prise en charge très médicalisée sans résultats physiques probants. Ainsi le soin aux animaux, le vivre ensemble seraient aussi efficaces en termes de rééducation sensorielle, de confiance en soi et de réinsertion sociale… La kinésithérapie répondrait mieux aux patients déficients moteurs.
A ce propos le psychanalyste parisien Serge Tisseron que j’ai accueilli pour le festival hier me faisait part de son point de vue à ce sujet :
« ST : Le chien ou le cheval thérapeute n’ont pas d’avenir dans l’univers médical, nous sommes déjà en train d’utiliser des robots qui remplacent l’animal et évitent les problèmes d’hygiène chez les enfants immuno-déprimés.
RS : Mais la chronobiologie, l’exercice des 4 sens qui sont stimulés par le contact à l’animal ?
ST : Les prototypes qui existent déjà ont des poils et des griffes et une minuterie qui se calque sur les rythmes biologiques du patient. »

Vétos, RS, public : échanges sur l’anthropomorphisme et l’infantilisation des NACs et des animaux domestiques ; la quête d’un certain exotisme, la réponse à un besoin d’une reconnection à la nature et à la recherche de notre animalité perdue dans notre modernité […]
La production animale industrielle des exploitations agricoles (les mots parlent d’eux-mêmes) formidablement illustrée par la séquence au Salon de l’Agriculture dans le doc d’Eric Bitoun, évoque les manipulations génétiques pour répondre à des canons esthétiques contre-nature et des exigences de rendement qui nous éloignent du concept d’empathie inter-espèces.
Depuis le néolithique, il nous faut repenser la question de la domestication entre l’anthropocentrisme dénaturant du toutou à sa mémère et la rentabilité d’une vache laitière dont la carrière est en 2014 de 2 à 3 gestations (inhérente à la marchandisation du vivant).
RS : A travers les deux approches thérapeutiques évoquées aujourd’hui (médecine vétérinaire spécialisée et ultra-médicalisée / médecine ostéopathique animale) se dessine le débat bioéthique essentiel du XXIè siècle à travers deux paradigmes :
D’une part, une vision mécaniste de l’animal machine à la Descartes qui répond parfaitement aux solutions médicales spécialisées de la médecine vétérinaire allopathique, technologique et symptomatique. D’autre part une vision holistique, le prévenir plutôt que guérir, le bien être animale dans ses paramètres environnementaux, comportementaux, émotionnels et commensaux. Les premiers progressistes scientistes fantasment sur l’amélioration des races et la croyance dans des miracles nano-technologiques et de dopage pharmaceutique. Les seconds utopistes vitalistes pétris d’humanisme et d’animisme considèrent l’animal dans l’universalité de sa physiologie et de ses besoins sociaux inter-mondes. Où serait le juste milieu, une science respectueuse de la place de chacun dans notre biodiversité humaine et animale ?
Ce choix d’éthique animale interpelle aujourd’hui le parlement européen qui est en train de légiférer sur la notion de bien-être animal. L’animal sera-t-il reconnu comme « être sensible », ce qui aura des conséquences pour l’allopathie vétérinaire et pour le monde de l’élevage industriel avec l’obligation de prise en charge de la douleur.
Les rencontres proposées dans ces trois films incarnent peut-être une jeune génération porteuse de cet étendard-là. A nous thérapeutes de trouver les arguments scientifiques en conscience et éthiques en bonne intelligence, pour proposer une médecine humanitaire et animalitaire.

Fait à Rouen, le 26 janvier 2014
Rachel SENAULT praticienne en Ostéopathie Animale
Tel : 06 48 11 91 53



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